La
saga des Lifting Bodies |
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VI.
Décapotable et C-47 réquisitionnés |
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Création/Mise à jour : 20/08/2003 |
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L’appareil originel contient les 3/4 de matériaux de récupération. On retrouve cette recherche du moindre coût dans la technique de décollage adoptée. Grands fans de planeurs, qu’ils pratiquent également à leurs heures perdues avec leurs copines ingénieurs elles aussi, et non des moindres (l’ambiance est très « parité » à l’époque, déjà, entre ingénieurs aux diplômes semblables, pas de sexisme !), nos trois mousquetaires de l’espace songent à tirer par câble leur rafiot, qui est aussi un planeur, puisque sa forme seule crée de la portance. (ça c’est plus difficile à imaginer à le voir aussi ventru et inélégant). Voiture ou avion, se demandent nos vélivoles ? Passionnés également de courses de voitures, ils se tournent tout d’abord vers Bonneville, la ville voisine, où ont lieu tous les ans des tentatives de records de voitures surcompressées. Un ingénieur de la Nasa, Walter "Whitey" Whiteside, qui y participe, leur donne conseil. Depuis plusieurs années, ce sont les Pontiac qui font les meilleurs temps. En 1960, la « Challenger » de Mickey Thompson a fait 654,219 km/h en 1960, avec 4 V8 Pontiac de… 28 litres de cylindrée… goshh !!!. Qu’à cela ne tienne, le remorqueur du futur planeur de l’espace sera donc un modèle de la firme, une « Catalina » un convertible de 1962. Le genre coupé sport US, à savoir large comme un ponton (3,12, pour 5,54 m de longueur !), des pneus dignes d’un camion européen, et un profil typique des années soixante, taillé à la serpe. Le monstre est aussitôt envoyé se faire doper chez Bill Straup, le roi du hot-rod de Long Beach. |
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Ce dernier en change les rapports de boîte, augmente la consommation dans des proportions affolantes (1 litre au km, et on évite l’injection de nitrométhane de peu !), inverse le siège arrière, ajoute une barre anti-tonneaux. Pour faire plus « fun », nos ingénieurs accolent un petit aileron arrière et les inévitables auto-collants réglementaires « propriété de la NASA », sur les portières… Ils ont choisi ce modèle précis car c’est l’un des rares à posséder assez de couple pour pouvoir tirer à 140 km/h leur assemblage de contreplaqué… ressemblant de très (très ) loin à un planeur d’avant guerre… Les ailes en moins, et qui pèse quand même sa bonne demi-tonne ! Anecdotiquement, le jour où l’un d’entre eux ramène l’engin de chez Straup au bercail, il ne peut refreiner son envie de la pousser sur l’autoroute… et se fait arrêter par un motard (les fameux California Highway Patrol ou CHIP), qui reste éberlué de voir le sigle NASA accolé à ce custom de l’administration américaine. Avec au volant un type qui chante à tue-tête « Fly Me To The moon » de Frank Sinatra, ou « Little Deuce Coupe » des Beach Boys !. Voilà pour le cas du lancement par câble terrestre, voyons maintenant le remorqueur des airs… |
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Pour aller plus haut, même solution « cheap » pour nos 3 pieds nickelés : un bon vieux C-47 de la base d’Edwards fera l’affaire… comme en 1944, lors du débarquement de Normandie, le C-47 redevient remorqueur de planeurs ! En réalité, c’est un R4D de la NACA, l’appellation « Navy » du C-47, qui dispose d’une bulle d’observation au dessus du cockpit, idéale pour surveiller l’arrière de l’appareil. Bref, l’ingéniosité, voire les talents de chineurs et de récupérateurs, ne sont pas les moindres des qualités de ce trio d’exception. Tout compris, le projet revient à 30 000 dollars, le prix d’un Cessna « Skyhawk » de l’époque. Les sénateurs, toujours méfiants à l’égard de l’usage de l’argent du peuple américain, qui ont eu vent du projet par la presse du coin… se font alors vertement clouer le bec par Bikle, le responsable de la NASA et patron mère poule de notre trio: c’est le projet le moins cher de toute l’histoire de la recherche aéronautique ! Bikle le rigoureux n’a pas la réputation de laisser faire n’importe quoi ! Remarquez, un jour, il téléphonera quand même à ces 3 employés en leur ordonnant de cacher discrètement la Pontiac, achetée sans aucune autorisation officielle : une descente inopinée d’un « ponte » du Congrès est annoncée par la bande ! |
Sources : Auteur de ce dossier : Didier Vasselle |
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