La
saga des Lifting Bodies |
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XV.
Les lifting bodies Russes |
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Création/Mise à jour : 20/08/2003 |
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Les baignoires russes : Pour ne pas perdre leurs habitudes des temps de la guerre froide, les Soviétiques nient farouchement encore, dans les années 70, mettre au point un véhicule similaire. Mais la simple lecture de Popular Mechanics les a mis sur la voie. Et les spécialistes américains s’en rendent compte, à voir l’incessant ballet des lancements de satellites Cosmos, tous destinés « à des recherches scientifiques », selon Moscou (plus de 50 modèles rien que pour l’année 1965). Beaucoup trop retombent après une seule révolution, et leur trajectoire est révélatrice d’une portance lors de la rentrée. C’est Chelomei qui teste son Raketoplan. Mais d’autres sont sur les rangs : Korolev, le père, avec Glouchko, de la fameuse fusée soviétique R7 (celle du Spounitk mais aussi et encore des Soyouz actuels, près de 45 ans après le premier vol), a en effet pour ami Myasishchev, l’auteur de l’infortuné Mya-4 Bison, le quadriréacteur supplanté par le Tupolev TU-95 Bear. D’excellents copains, qui ont eu largement eu le temps de s’apprécier … au goulag ! |
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Myasishchev a dessiné en 1957 le VKA (pour Véhicule Aéro Spatial). Un drôle d’oiseau tout en facettes, bien avant le F-117. Mais il ne fait pas recette devant les responsables du parti. Myasishchev, dont on connaît la ténacité (ses joutes avec Staline lui ont fait une belle réputation), revient à la charge en 1960 avec un autre projet… le VKA-2. L’engin ressemble au DynaSoar, mais et possède des skis à la place du train d’atterrissage conventionnel. Le premier projet à facettes est re-proposé également sous le nom VKA-23. Comme les Russes proposent toujours deux projets en même temps, choisis au dernier moment par la direction du parti, un autre projet, celui de PV Tsybin, est également proposé : plus conventionnel, avec des ailes dépliables et un fuselage effilé à l’avant qui le fait surnommer le sabot (« lapotok ou « lapot » »). On imagine pour le premier un refroidissement des surfaces par métal liquide ( ?), qui ne sera jamais mis au point, et on teste également pour lui un super siège éjectable qui ne fait que 160 kg… et qui ressemble comme deux gouttes d’eau aux capsules fermées des Convair B-58 ou du XB-70. Le KGB fonctionne toujours aussi bien ! Les deux projets en restent à ce stade, car le 2 juin 1966 l’URSS choisit de s’engager davantage dans la voie du vaisseau de récupération piloté. Elle a pourtant fort à faire avec la mise au point de sa super fusée lunaire récalcitrante. |
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Et la brique devint sabot : Au gré des coteries du sérail moscovite, c’est la firme MIG, et non sa concurrente Tupolev, en définitive, qui hérite des projets de Chelomeï et s’attèle à la réalisation d’un petit lifting body devenu alors EPOS (Experimental Passenger Orbital Aircraft). Une dénomination qui cache le but visé : Moscou souhaite posséder en réalité une mini-navette d’attaque spatiale ( !), appelée Ouragan, dont le but est le thème de campagne de Ronald Reagan : la « guerre des étoiles ». L’enfin serait monté sur une navette plus importante nommée Spiral, testée lors d’un –faux- lancement de Soyouz. Les Russes sont effrayés par les capacités d’emport de la navette US, et la leur prend trop de retard. Au gré des changements politiques, le projet Spiral disparaît…ou ressort des limbes. Le 11 Octobre 1976, le MIG 105-11, piloté par A. G. Festovets s’élance (tout seul) d’un terrain près de Moscou, atteint péniblement 560 m d’altitude… et atterrit au centre d’essais en vol Zhukovsky situé….19 km plus loin.. Le 27 novembre 77, à la manière des américains, mais sous un Tu-95K (spécialisé dans les lancements de gros missiles) il est largué de 5 000 m et atterrit sur ses skis, dans un terrain boueux comme affectionnent les pilotes soviétiques. |
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Sept vols ont lieu sans problèmes, mais au 8ème, l’appareil rate son atterrissage et se retrouve rayé des registres. Son double est toujours visible à Monino, juché sur ses 4 skis. Il a conservé lui aussi le surnom de sabot, donné par son avant en forme de semelle caoutchoutée. Une forme très étudiée, qui sera reprise par… la NASA pour son HL-20, qui réduit la chaleur en conservant un cockpit avec une très bonne visibilité. L’appareil présente une autre particularité : des moignons d’ailes orientables. Repliés à 60 % durant l’entrée dans l’atmosphère, elles sont orientées à plat pour l’atterrissage. Les skis articulés se déploient avec une cinétique complexe, car leur logement est situé au-dessus du bouclier absorbant la chaleur. Ils peuvent être munis de roues à l’avant seulement, si besoin s’en fait sentir (et les terrains moins boueux !). Les caractéristiques de vol sont très proches des derniers lifting bodies US : une dizaine de minutes de vol, mais avec un réacteur Koliesov RD-36-35K de 2350 kg dont l’entrée d’air situé sur le dos de l’appareil demeure évidemment fermée lors du retour dans l’atmosphère. Les Russes copient, certes, mais ne peuvent s’empêcher d’ajouter leur touche personnelle ! |
Sources : Auteur de ce dossier : Didier Vasselle |
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