La
saga des Lifting Bodies |
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I.
Les fers à repasser volants |
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Création/Mise à jour : 20/08/2003 |
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Une drôle de barrique à ailettes en contreplaqué, tirée en plein désert par un coupé sport piloté le pied au plancher, un ciel bleu envahi par des maquettes radiocommandées qui se balancent au bout de leur parachute multicolore, un crash filmé en direct qui devient le thème d’un feuilleton télévisé, un mannequin parachutiste qui se prend pour Batman : en 1960, le désert du Mojave est devenu complètement fou ! De jeunes ingénieurs y préparent en réalité la future navette spatiale américaine. A leur façon : pour l’instant, ce qui sort de leurs ateliers ressemble plutôt à de l’ électroménager : leurs « fers à repasser volants » vont cependant marquer pendant plus d’une décennie de leur empreinte une époque où l’on cherche à éviter le retour dangereux dans l’atmosphère des cosmonautes, ballottés lors de leur rentrée sous 8 ou 12 g, assis sur un four de haut fourneau, ou suspendu à une corolle de tissu qui les plonge immanquablement au beau milieu de l’océan. Cette histoire est aussi un hymne au bricolage de génie, tant les solutions trouvées sont surprenantes ! |
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17 Juillet 1962, sur la base d’Edwards, Californie. Le ciel est bleu azur, comme à son habitude dans cette magnifique région où l’on observe 320 jours de beau temps par an. Le coin est alors le paradis des avionneurs et des fous de vol, sous toutes ses formes : vol à voile, à hélice, a réaction, avec fusée ou statoréacteur. Chaque hangar recèle alors un engin différent. Aujourd’hui, on appellerait ça une « ruche à start-ups de l’aviation ». Où l’on venait serrer un dernier boulon à toute heure, refaire des calculs la nuit, monter incognito dans un simulateur pour le simple plaisir, où l’on dormait sous les ailes des bébés d’acier que l’on chérissait. Où l’on voyait tous les jours dans le ciel magnifique, des plus fêlés encore tenter d’arracher du limon, du sel ou du béton ses tonnes de ferrailles qui deviendraient plus tard les fers de lance de l’aviation US de la série « Century »: Super Sabre, Voodoo, Starfighter, Delta Dagger, etc… Pour les plus connus, ou les mieux réussis, car l’endroit garde aussi la trace d’échec patents : le X3, le dard volant, incapable de voler plus vite que ses prédécesseurs, et qui avait bien besoin d’une piste de 5 km pour s’arrêter, le X-5, un projet Messerschmitt (le P.1101) à peine déguisé, emmené d’Allemagne alors qu’il n’était pas terminé, et qui repliera assez vite ses moignons d’ailes, le petit coq X-4 (Bantam), mignon, certes, mais un peu turbulent, sans sa queue rognée. Sans parle du XF-91 (Thunderceptor), pas un mauvais avion, mais qui suçait tellement de kérosène qu’il ne pouvait tenir que 25 minutes en vol. |
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Des échecs rageants, aussi, quand il s’agissait de « planter » un projet en voie de réussite technique pour de sombres aspects politiciens, ou des décisions financières aussi arbitraires que connurent un peu plus tard les anglais ou les canadiens, avec l’abandon du TSR.2 et de L’Avro Arrow, au demeurant de bien jolis monstres. Car ici aussi, malgré le climat enjôleur, les politiciens du Congrès continuent à faire la pluie et le beau temps en plein désert… au point de développer chez les militaires un art prononcé du camouflage… de budget ! Pour l’instant, rien de cela : le ciel est bleu, ce jour-là, le cinquième astronaute américain… est un vrai pilote d’avion, c’est Robert White, qui vient de se poser sur ses deux skis arrière sur la base, après avoir atteint 95 940m d’altitude, et connu l’effet ineffable de l’apesanteur dans son X-15, qui a aussi atteint par la même occasion 6166 km/heure ! L’avion hors du commun retient toute l’attention des médias. En France, Paris-Match en fera sa une. A côté, dans les hangars, pourtant, des choses tout aussi extraordinaires se préparent… Celui dévolu au X-15 contient d’autres engins tout aussi extraordinaires…. |
Sources : Auteur de ce dossier : Didier Vasselle |
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