La
saga des Lifting Bodies |
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XVI.
Buran & Bor |
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Création/Mise à jour : 20/08/2003 |
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Spiral est définitivement abandonné le 1er septembre 87. La navette russe est prête ! Mais les Soviétiques ne font jamais rien comme les autres, on le sait. L’exemple de Buran est symptomatique : après dix années noires, ils réussissent de main de maître, le 29 Octobre 1988, le plus beau vol automatique jamais fait de bout en bout par un véhicule spatial, le posent sans encombre…et le laissent pourrir devant son hangar, et finissent même par le déposer en plein Moscou, au parc Gorki (il s’agit en réalité d’un autre exemplaire, destiné à abriter… un bar !). Il est vrai que le vol de Buran montre le chant du cygne de l’URSS, exsangue financièrement. Une navette capable de contenir une station Mir toute entière, dont tout le développement a été inspiré par le projet américain : pas de tir complet déplaçable (sur rails et non sur chenilles), transport et largage à dos de MT4 ou Mriya, largage d’essai,… il n’y a que l’avion d’accompagnement qui change : ici, c’est un Mig 25 et non un Starfighter! L’échec du projet lunaire N1 a laissé énormément de traces en URSS : finis les ingénieurs aventuriers, saluons le retour en force des espions de l’ex-KGB, qui fournissent en masse les plans détaillés de la navette américaine depuis le tout premier coup de crayon donné par la Nasa, dès 1972. |
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12 années d’efforts ont néanmoins été nécessaires : la décision de la mettre en chantier (décret officiel 132-5 ) date du 12 février 1976 ! Le troisième vol aurait du être le vol habité, mais une fois encore des dissensions entre l’armée et les ingénieurs de Baikonour, la mort accidentelle de 2 des cosmonautes retenus (Levchenko et Shchukin), et l’effondrement qui suit la chute du mur de Berlin firent capoter définitivement le projet. Dommage : au salon du Bourget, le 4 juin 89, la visite de l’immense avion porteur Antonov 225 Mryia, surmonté du modèle qui vient de réaliser l’exploit marque encore les esprits (et les oreilles !). Trois modèles ont été effectivement construits. Un quatrième est un peu spécial : la Buran Analogue, construite pour tester les atterrissages de la navette réelle. C’est un avion véritable : dotée de 4 moteurs à réactions AL-31, elle peut décoller par ses propres moyens, voler à 5000 m et atterrir pilotée : 140 vols ont été réalisés, certains entièrement automatiquement pour tester le vol inaugural de Buran. Les pilotes disposent des mêmes sièges éjectables que la navette grandeur nature, les RM-1 et RM-2 (au contraire de la navette US qui en est dépourvue). Georgi Shonin et Yevgeni Khrunov en sont les pilotes les plus connus… car ils ont été à l’origine d’un accident lors d’un atterrissage raté. Aujourd’hui, on rencontre même l’Analogue dans certains meetings aériens soviétiques (celui de Zhukovsky, en banlieue de Moscou, où elle est stationnée), où elle vient montrer l’ancienne splendeur aéronautique perdue ! |
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D’étranges briques tombées dans la Mer noire : Dès les années 80, les Américains savaient déjà que les Russes avaient mis en chantier un ou plusieurs projets avancés de navettes spatiales. Le 4 juin 82, en effet, un Lockheed Orion australien survolant l’Océan Indien, à 17 degrés sud et 98 degrés est, à 560 km des iles…Cocos (sic), avait pris une série de photos très intéressantes : des chalutiers bardés d’antennes satellites et des navires de la marine soviétique s’affairaient pour récupérer ce qui semblait bien être une mini-navette spatiale. Exactement le clone du cône de rentrée du projet américain PRIME de 1966 ! Les Russes, selon leurs habitudes, parlent de Cosmos 1374. Même chose à deux reprises jusque 1984 (Cosmos 1517 et Cosmos 1614), où l’on découvre qu’il s’agît de BOR-4, un vaisseau qui n’est autre que la version définitive spatiale du MIG 105, resté uniquement atmosphérique.
Celui-ci a perdu au passage son réacteur, ses ailes repliables. Et son bouclier, s’il a gardé un avant en forme de semelle de basket en matière ablative, contient aussi désormais 108 tuiles de porcelaine (contre 30671 pour la navette US un vrai casse-tête à réparer…manuellement !). Celles qui serviront à Buran, bien entendu. Mais le temps n’est plus vraiment à la guerre froide. Et comme chacun sait ce que l’autre a en face, on décide cette fois de mettre en commun le savoir. |
Sources : Auteur de ce dossier : Didier Vasselle |
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