La
saga des statoréacteurs |
|||
VI.
Les premiers projets de statoréacteur combiné |
|||
Translate : ![]() ![]() ![]() |
Création/Mise à jour : 22/08/2004 |
|
Un des inconvénients majeurs du statoréacteur est son incapacité à fonctionner à basse vitesse. Naturellement, c’était un obstacle pour la mise en service d’appareil opérationnel et dès la fin des années quarante, de nombreuses firmes cherchaient des solutions pour rendre ce type d’appareil autonome. Parmi les solutions possibles, il y a le combiné turbo-statoréacteur dans lequel un turboréacteur sert de propulseur pour les vitesses inférieures à la vitesse de fonctionnement du statoréacteur, essentiellement le décollage et l’atterrissage. Il y a aussi le combiné stato-fusée dans lequel un moteur-fusée remplit le même rôle que le turboréacteur. Une des rares études connues pour un avion à stato-fusée fut le Sud-Est X-207S français. Cette firme travaillait alors sur divers projets d’engins sol-sol à statoréacteur (voir chapitre 9) et proposa un avion équipé de ce type de propulsion dès 1949-1950. Le X-207S possédait une voilure et un empennage en flèche monté haut sur le fuselage. Le fuselage était un long cylindre à double paroi formant le statoréacteur avec un corps central formant la cabine à la manière des Leduc ou du XP-92. Le pilote était couché dans une cabine pressurisée et largable. L’arrière du corps central était occupé par le moteur-fusée et ses réservoirs de carburant et comburant. La tuyère du moteur fusée était donc à l’intérieur du statoréacteur. La coque à double paroi du fuselage aurait contenu une partie du combustible, le train et l’armement, constitué de 50 roquettes air-air. Le corps central contenant la cabine et le moteur fusée consistait donc, en fait, en un cône d’entrée d’air et se déplaçait pour réguler la poussée du statoréacteur. L’avion devait décoller et amorcer son accélération grâce à la seule poussée de son moteur-fusée de 2000 kgp. Du fait de son architecture complexe et de la réalisation particulièrement difficile qui en découlait l’appareil fut rapidement abandonné. |
|
A la même époque l’Arsenal de l’Aéronautique travaillait également sur les avions à statoréacteur. Cette firme avait été fondée en 1936, au moment de la nationalisation de l'industrie aéronautique, pour servir à l'Etat français d'établissement témoin. Vers la fin de 1950, Arsenal proposa un intercepteur supersonique à propulsion mixte équipé d’un turboréacteur et de deux statoréacteurs. L’appareil avait une grande taille avec une envergure de plus de 12 mètres et une masse de 10 tonnes. Les ailes avaient une flèche modérée et portaient à leur extrémité un gros statoréacteur de 1600 mm de diamètre. Le fuselage comportait une pointe avant largable, avec la cabine du pilote, une partie centrale contenant le train tricycle, une partie des équipements, une soute à roquettes et deux importants réservoirs de combustible. La partie arrière contenait le turbo-réacteur Atar 101B alimenté par une prise d’air dorsale. Arsenal proposa également un appareil similaire doté d’une aile à plus forte flèche connu sous le nom d’Arsenal 1401. On peut citer aussi l’Arsenal 1910 de formule turbo-stato avec un Turboméca Marboré installé dans l’axe du statoréacteur ou l’Arsenal VG-93, une variante du chasseur à réaction VG-90 avec deux petits statoréacteurs en bout d’aile. |
|
Matra, de son côté, étudia vers 1948 le R-130 un avion supersonique très inhabituel qui possédait une voilure pour le vol subsonique et une autre, complètement distincte, pour le vol supersonique. La propulsion était fournie par un combiné turbo-statoréacteur composé d’un Rolls-Royce Nene et d’un statoréacteur installé à l’arrière autour de la tuyère du turboréacteur. L’entrée d’air du statoréacteur était également à l’arrière et ceinturait tout le fuselage. Le train d’atterrissage monotrace comprenait un diabolo principal et une roue orientable à l’avant. Ces éléments, très longs pour tenir compte de la présence sous l’appareil de l’une des ailes supersoniques, s’escamotaient dans le fuselage. Au décollage, le R-130 utilisait sa voilure à grand allongement et le seul turboréacteur alimenté par des entrées d’air escamotables à l’avant de l’avion. Le statoréacteur était ensuite démarré, les entrées d’air fermées et le turboréacteur mis au ralenti. Ce dernier fournissait juste la puissance nécessaire au fonctionnement d’un dispositif d’aspiration de la couche limite de l’entrée d’air du statoréacteur. L’appareil pivotait ensuite de 90° autour de son axe, la cabine restant en position normale en pivotant en sens inverse, pour utiliser la portance de la voilure supersonique à faible allongement. Dans le même temps, la voilure subsonique était repliée dans le fuselage. L’appareil volait ensuite à vitesse supersonique jusqu’à la fin de la mission puis revenait au terrain en vol plané. Le pilote était installé couché dans un cône largable à l’avant de l’appareil. Le pilote disposait d’un périscope pour la vision vers l’extérieur. Cet appareil beaucoup trop complexe pour l’époque fut abandonné vers 1951 et Matra se concentra sur les missiles et autres engins guidés à statoréacteur. |
|
Aux USA, Republic Aviation présenta un projet presque aussi extraordinaire que le Matra R-130, le XF-103. C’était un intercepteur capable de surpasser en vitesse et altitude les nouveaux bombardiers intercontinentaux soviétiques bientôt disponibles en quantité d’après la CIA. Le XF-103 fut développé comme un système d’arme complet comprenant le missile air-air Hughes F-98 Falcon et le système de contrôle de tir MA-1. Le XF-103 était un avion extrêmement avancé capable de voler à Mach 4 jusqu’à 24 000 mètres d’altitude. Cette performance phénoménale devait être réalisée avec un combiné turbo-stato permettant à l’appareil d’être autonome. Au décollage et à faible vitesse, le XF-103 devaient être propulsé par un turboréacteur Wright XJ67-W-3 évalué à 6800 kgp à sec et 9980 kgp avec la postcombustion. A grande vitesse, la poussée du turboréacteur devait être complétée par un statoréacteur Wright XRJ55-W-1, capable de fournir une poussée de 8535 kgp. La poussée du réacteur étant limitée, aux nombres de mach élevés, par la température maximale permise en entrée de turbine, l'air devait bipasser en partie le compresseur, la turbine et la chambre de combustion pour faire fonctionner le statoréacteur. De cette manière, la poussée du combiné turbo-stato devait augmenter avec la vitesse au-delà de mach 2. Une poussée totale de 17000 kgp devait être disponible à haute altitude. Les moteurs étaient alimentés par une grande prise d’air montée sous le fuselage. Le fuselage était lisse du nez jusqu’à la queue, même l’habitacle du pilote était entièrement noyé dans le fuselage. Le cockpit était équipé de seulement deux petites fenêtres latérales. La vue vers l’avant était obtenue par un périscope. Pour l’évacuation d’urgence du pilote, une capsule éjectable vers le bas était intégré dans l’habitacle. Les petites ailes avaient une configuration delta avec un bord d'attaque incliné à 55 degrés, mais le XF-103 n’était pas un vrai delta, puisqu’il avait un empennage horizontal en delta avec une flèche de 60 degrés. Un aileron ventral était également monté sur la partie arrière du fuselage et rétracté sur le côté pendant les décollages et les atterrissages. Le train d'atterrissage était de type tricycle et se rétractait dans le fuselage. L’armement devait être composé de six missiles air-air Hughes logés dans des compartiments internes du fuselage, plus 36 roquettes non guidées. Le XF-103 devait être construit entièrement en titane en raison de la résistance de ce métal à l’échauffement aérodynamique à haute vitesse. Malheureusement, comme le R-130, le XF-103 était beaucoup trop novateur pour l’époque et L’USAF annula finalement le projet le 21 août 1957. |
La saga des statoréacteurs |