La
saga des statoréacteurs |
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V.
L'âge d'or des statoréacteurs |
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Translate : | Création/Mise à jour : 22/08/2004 |
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Le début des années cinquante marque le commencement de l’âge d’or du statoréacteur. C’est à cette époque et jusqu’à la fin des années soixante que les engins les plus ambitieux furent réalisés et les projets les plus extraordinaires étudiés. Naturellement, les nations les plus en pointe dans ce domaine produisirent les résultats les plus significatifs, avec les avions à statoréacteur en France et divers missiles de croisière et d’interception en France, aux USA et en URSS. La première de ces réalisations marquantes fut le Leduc 010 qui date en fait du début des années quarante comme on l’a vu précédemment. Le Leduc 010 fut, en 1949, le premier avion propulsé uniquement par un statoréacteur même s’il ne pouvait décoller seul en l’absence d’un propulseur d’appoint. Le statoréacteur construit par Leduc était de loin le plus grand de son époque avec un diamètre de 1500 millimètres et un système de combustion composé de cinq viroles concentriques munies de trois ensembles annulaires de brûleurs. Il y avait également des petites aubes qui favorisaient la vaporisation du kérosène. L’appareil entier était construit autour de son statoréacteur. La cabine de pilotage largable, avec une visibilité assez réduite, était installée à l'avant devant l'entrée d’air. Cette cabine à nez vitré était non pressurisée et devait être récupérée par parachute après une éventuelle séparation d’urgence. Suivait une section contenant une petite turbine à gaz conçu par Leduc qui servait pour l’entraînement de la pompe d’alimentation du statoréacteur. Cette fonction est traditionnellement assurée par un dispositif intégré aux turboréacteurs et entraîné par les parties tournantes mais celles-ci sont absentes des statoréacteurs. |
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Le reste de l’appareil était classique avec une voilure et des empennages droits. Le carburant était contenu dans des réservoirs d'aile et le train d'atterrissage, escamotable manuellement et seulement pour la sortie, était classique. La structure de l’appareil était entièrement métallique avec une cellule légère et robuste. L’aile avait une épaisseur relative de 10%, un allongement de 6,5 et était constitué de deux longerons délimitant le réservoir structural. Après les séries d’essai en vol composite et en vol plané, menés de 1947 à 1949 et constamment perturbés par l’indisponibilité de certains systèmes, le premier vol d’un avion à statoréacteur put enfin être réalisé le 21 avril 1949. Ce jour là, après avoir décollé de Blagnac, le Languedoc monta rapidement à son altitude de croisière. Jean Gonord se sépara de l’avion porteur à 430 km/h et 3200 mètres d’altitude puis alluma le statoréacteur. Le Leduc 010 effectua ensuite une montée sur la seule poussée de son statoréacteur et atteignit une vitesse de 680 km/h à 5400 mètres d’altitude. L’appareil vola pendant une heure puis retourna se poser sans problème à l’issu de cette première mondiale. |
(Photo ci-dessus : Collection Lena Perrin) |
Au cours des vols suivants, les pilotes d’essai constatèrent rapidement que certaines caractéristiques du Leduc 010 étaient exceptionnelles, tout particulièrement la vitesse ascensionnelle. Le 010 avait une vitesse ascensionnelle maximale de 20 m/s à 10000 mètres soit le double du F-86 contemporain. Du reste, en septembre 1951, Albert Boyd et Chuck Yeager vinrent assister à Istres aux essais du 010 et eurent le plus grand mal à suivre le prototype français avec leur F-86. Les essais en vol du Leduc 010 continuaient avec une régularité de bon alois avec le renfort du deuxième prototype à partir de septembre 1951. Malheureusement, les ennuis sérieux commencèrent le 27 novembre 1951 lors du 44ème vol du second prototype qui s’écrasa en blessant son pilote, Jean Sarrail. La panne était du à une rupture d’arbre de la turbine d’alimentation en carburant, suivi évidemment d’une extinction du statoréacteur, d’un atterrissage très dur et de la rupture de l’appareil. La série noire continua avec le premier prototype, le 25 juillet 1952, lorsque le prototype heurta l’avion porteur lors de la séparation. L’appareil se mit alors en vrille et son pilote fut contraint lui aussi à un atterrissage en catastrophe. L’appareil toucha le sol si durement que la cabine largable se détacha et le pilote, Yvan Littolf, fut, lui aussi, sérieusement blessé. |
(Photo ci-dessus : Collection Jean Lanvario) |
Bien que les seuls avions à statoréacteur à avoir été construit furent les avions Leduc et le Nord 1500 Griffon, les Français n’étaient pas les seuls à s’intéresser à ce type d’appareil aux performances prometteuses surtout à une époque ou les turboréacteurs étaient encore peu puissants. Au USA, une équipe de Consolidated Vultee Aircraft Corporation (Convair) avait gagné une compétition en mai 1946 pour un intercepteur supersonique capable d'atteindre une altitude de 15 000 mètres en quatre minutes et une vitesse de 1260 km/h. l’appareil de Convair, désigné XP-92, était un avion propulsé par un statoréacteur mais il y eut aussi une variante propulsée par moteur-fusée. L’appareil fut assez vite été abandonné sous cette forme pour réapparaître un peu plus tard avec un turboréacteur et une aile delta (voir histoire du XF-92). En URSS, l’OKB-293 de M.R.Bisnovat étudiait un « avion fusée n°5 » doté d’un statoréacteur RD-700 de M.M.Bondariouk. Pour la mise au point de cet appareil et du missile Chtorm, Bisnovat construisit les engins « LM » entre 1946 et 1953. Le modèle LM-15 était catapulté depuis le sol et effectua quatre vols d’essais équipé d’un statoréacteur RD-550 de Bondariouk. Il y eut une version pilotée de cet engin qui peut être qualifié « d’avion à statoréacteur ».
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La saga des statoréacteurs |