Les
avions à aile gouttière de Willard Custer |
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X.
Des bâtons dans les roues |
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Création/Mise à jour : 25/04/2005 |
Pour décrocher la certification FAA un second modèle est mis en chantier... cette fois à partir de rien, l'avion est entièrement construit sur place. Le Brigadier original est tout simplement copié, et des petites différences apparaissent... essentiellement des demi-tonneaux moins épais pour réduire la traînée, des moteurs Continental de 260 ch de puissance et une dérive agrandie supportant un stabilisateur placé plus haut. Les employés ayant construit l'appareil n'en sont pas à leur premier coup, ils maîtrisent complètement la fabrication d'un avion. Ils travaillaient auparavant chez Fairchild, usine située tout près. C'est à Haggerstown, en effet, sur le terrain qui jouxte l'usine, que le premier Fairchild PT-19 vole pour la première fois en septembre 1939. C'est la aussi qu'on lieu les essais catastrophiques du modèle M-224-L de la firme. Visiblement, Fairchild ne sait pas faire d'avion STOL, alors qu'à deux pas de chez elle, il y a un avion qui décolle en moins de 100 mètres... Rageant. Il n'empêche. La commission d'approbation et de sécurité de la FFA rechigne à délivrer le certificat de vol avec des moyens qui rappellent trop ceux employés par Detroit pour empêcher Tucker de sortir sa voiture révolutionnaire à moteur arrière. |
Les deux histoires se ressemblent trop pour qu'on ne fasse pas le parallèle (voir ici) surtout la lettre de Preston Tucker du 15 juin 48 dénonçant la cabale contre lui. On lui fait remonter le stabilisateur horizontal, par exemple, sous prétexte de sécurité. Custer n'apprécie pas, sachant qu'il a besoin d'un stabilo placé pile dans le flux des hélices, voir au-dessous pour avoir davantage d'efficacité (la queue sert aussi à la portance dans ce cas au moment du décollage). Pour couper court, Custer dépose un brevet à ce propos. Mal lui en prend en fait. Un autre appareil, quelques années plus tard, se servira du procédé... Le sien tardant à être commercialisé, Custer fait appel à Popular Mechanics, qui refait le même coup qu'en 1947, mais 17 ans après (septembre 64 aux USA, Novembre en France), en affichant à nouveau "à la une" un bimoteur de Custer dans une chatoyante parure de blanc et de rouge (copiée sur le Baumann d'origine !), et un article une nouvelle foi dithyrambique à son égard. Custer est alors âgée de 65 ans, et son long combat contre l'establishment l'a miné. C'est désormais un petit bonhomme aux cheveux blancs et au petit chapeau de feutre qui accueille les journalistes de PM. Le rédacteur de l'article est en l'air au bout de 75 mètres seulement de roulage à son premier vol, et constate une nouvelle fois que l'engin à du répondant, même si sa vitesse maximale est assez limitée, faute de moteurs assez puissants. L'appareil n'est pas parfait, car il possède encore les hélices tournant dans le même sens, et a donc tendance à s'enfoncer à droite avec le couple. La conclusion de l'article est d'une tristesse incommensurable, l'auteur demandant à Custer "comment il avait fait pour tenir aussi longtemps à cette unique idée", qui lui a avait valu "tant de déceptions". Custer lui répondant par un terre à terre "j'étais d'abord furieux, puis je me suis rendu compte que j'étais trop en avance sur mon temps. et je me remettais au travail". En réalité, Custer n'en peut plus d'une telle injustice : ses avions ont des capacités que d'autres n'ont pas, et pourtant personne ne s'y intéresse vraiment. Il a trop l'impression d'être devenu le paria de l'aviation depuis que l'armée l'a rayé de ses commandes et qu'on lui a refusé ce fameux poste d'ingénieur qui l'aurait consacré. Peu de temps après, on démontait le premier prototype qui figurait en couverture de PM pour le mettre aux normes édictées par la FFA. L'appareil ne sera jamais plus remonté. Il a aujourd'hui totalement disparu. On songe pourtant un temps à produire l'appareil en série, c'est la firme Noordyun Aircraft Limited of Canada qui s'annonce intéressée. Mais les retards de certification US vont tout faire capoter. En 1965, on accuse même Custer d'avoir revendu illégalement des pièces de Baumann, mal entreposées, ce à quoi répond aussitôt Custer par un procès en règle. Lassé, et complètement ruiné, Custer se résigne à vendre son entreprise en 1970 pour 26 000 dollars seulement, même pas le 1/3 du prix de vente annoncé de son CCW5. En 1977, Airpower Magazine fait un long article à propos de l'avion à ailes gouttières déjà oublié. En terminant cette fois sur le pour et le contre. Et en affirmant que seul le futur allait pouvoir démontrer si Custer avait raison. Le pauvre ne verra pas de son vivant les réalisations de ses idées : il meurt totalement ruiné en 1985, le soir de Noël, non sans avoir chargé l'un de ses fils de défendre sa mémoire et... ses brevets. La famille a toujours été très unie autour de ce père combatif et têtu. Aujourd'hui encore, l'un des fils, Harold "Curley" Custer, se bat toujours sur le Net pour maintenir la mémoire de ce découvreur ignoré. |
Sources : Auteur de ce dossier : Didier Vasselle |
Les avions à aile gouttière de Willard Custer |