Les
avions-fusée Russes |
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XI.
Le Bereznyak 346 |
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Création/Mise à jour : 27/12/2004 |
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Le Bereznyak « 346 » était un avion fusée expérimental d’origine allemande développé par le DFS. Le but final du programme DFS-346 était extrêmement ambitieux puisqu’il s’agissait de réaliser un appareil capable d’atteindre la vitesse de Mach 2 ! Cependant, la fin de la guerre entraîna l’annulation de ces recherches et le DFS 346 en était aux études et à la construction de quelques maquettes et d’un prototype de soufflerie, lorsque les Américains découvrirent le programme. Ces derniers ne s’y intéressèrent pas et l’on crut jusqu’aux années 90 que le DFS 346 n’avait pas dépassé le stade des études. En fait, les Soviétiques avaient mis la main sur le dossier du DFS 356 et surtout sur les ingénieurs qui avaient conçu ce programme. Comme pour l’OKB-1, dirigé par Brunolf Baade pour développer le Junkers Ju-287, ils créèrent un deuxième bureau d’étude, l’OKB-2, dirigé par Hans Rossing et le Russe A Bereznyak, pour développer le DFS-346. Le 22 octobre 1946, un deuxième groupe d'ingénieurs allemands était donc transféré à Podberezié. Les modèles réduits et le prototype de soufflerie construit en Allemagne furent testés au TsAGI et un B-25 fut équipé d'un nez largable pour mettre au point le système de sauvetage. De plus, l’appareil fut rebaptisé « 346 » à la place de DFS-346 pour supprimer toute référence à son origine allemande. Comme son homologue américain Bell XS-1, le 346 était un monoplan métallique doté d’un fuselage parfaitement profilé avec des ailes médianes. La construction était presque entièrement métallique avec utilisation d’un alliage léger et de rivets noyés pour améliorer la traînée. Le fuselage était de section circulaire et composé de trois éléments : La partie avant, en ogive, avait un nez conçu pour glisser vers l’avant pour permettre au pilote d’accéder au cockpit et pour être largué en cas d'urgence. Cette section formait un habitacle pressurisé dans lequel le pilote était couché sur le ventre et observait l’extérieur à travers un nez transparent en Plexiglas. Cette position, très inconfortable, avait été choisie dans le seul but de réduire la traînée autant que possible. |
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Le compartiment pilote était suivi d’une courte partie cylindrique, reliée à une partie arrière dont la section devenait progressivement rectangulaire avec des angles arrondis. Le système de sauvetage était le même que celui du DFS 228 et était donc constitué d’une partie avant largable par l’intermédiaire de boulons explosifs. Après largage, un parachute stabilisait la trajectoire puis le pilote était à son tour éjecté avec un système à air comprimé. Le pilote atterrissait ensuite sous son parachute. Immédiatement derrière le compartiment largable, il y avait un réservoir de peroxyde d'hydrogène concentré à 80 % (appelé T-Stoff en Allemagne) suivis par des réservoirs de méthanol/hydrazine (C-Stoff). Le train d'atterrissage était constitué d’un patin escamotable sous le fuselage et d’un petit butoir en acier sous l’extrémité arrière du fuselage. Des bouteilles d’air comprimé fournissaient la pression pour rétracter le patin d’atterrissage dans un compartiment ventral ainsi que pour manœuvrer les ailerons. Les ailes avaient une flèche de 45°, une épaisseur relative de 12% et une surface de 19,87 m2. Le bord de fuite était occupé par des volets d’atterrissage simples et des ailerons en deux éléments, interne et externe, qui était couplés ou non en fonction de la vitesse. A basse vitesse, les deux éléments étaient braqué ensemble tandis qu’à haute vitesse, seuls les éléments externes étaient utilisés. Après les essais en soufflerie, deux cloisons d’extrados reliant le bord d’attaque aux volets de bord de fuite furent installées pour combattre le décollement des filets d’air à incidence élevée. Ce phénomène entraînait une perte de stabilité longitudinale de l’appareil. La solution des cloisons sera d’ailleurs utilisée sur la plupart des appareils à ailes en flèche soviétiques des années cinquante et soixante. L’appareil était équipé d’un empennage arrière en T. Les surfaces horizontales avaient un plan fixe réglable de –2° à +2 et des surfaces mobiles en deux éléments qui étaient, comme les ailerons, braquées différemment suivant la vitesse. La dérive avait une flèche de 35° et le gouvernail était également en deux éléments. Il y avait une petite surface verticale surmontant la dérive au-dessus des surfaces horizontales qui servait aux faibles vitesses. A grande vitesse, le gouvernail était utilisé de manière classique. Cependant, ce système de gouvernail était peu efficace et ne fut utilisé que sur le premier prototype, le 346P. Le «346» était propulsé par un moteur-fusée Walter HWK 109-509C qui était, en fait, le moteur initialement prévu pour le Me-263, une version évoluée du Me-163 Komet. Ce moteur, appelé ZhRD-109-510 en URSS, avait deux chambres de combustion superposées, une de croisière et une utilisée seulement pour le décollage ou pendant de brèves périodes où la poussée maximale était nécessaire. La chambre de croisière avait une poussée au sol de 300 kg et la chambre principale une poussée de 1700 kg. Le peroxyde d’hydrogène était décomposé sur un catalyseur (permanganate de potassium) pour produire des gaz chauds qui entraînaient une turbine pour le pompage du carburant. Ces gaz étaient ensuite mélangés à l’hydrazine/méthanol ce qui produisait la combustion et la poussée. La poussée combinée à haute altitude était de l’ordre de 2250 kg et il y avait suffisamment de carburant pour deux minutes de fonctionnement à pleine puissance. |
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En 1947, le premier prototype non motorisé, désigné 346P (ou encore 346A ou 346-1), était achevé. Ce planeur était destiné aux essais d’arrimage et de largage avec l’avion porteur, de mesure de stabilité en vol et de mise au point des procédures d’atterrissage. Le 346P avait un habitacle non pressurisé et les trappes du patin rétractable avaient été démontées pour limiter sa masse. Le 346P fut transféré en 1948 sur le terrain d'essai de Tyoplyi Stan et fixé sous l'aile droite d'un B-29 capturé. Il n’était pas piloté par un Russe mais par Wolfgang Ziese, qui avait été précédemment pilote d'essai en chef pour la firme allemande Siebel Flugzeugwerke. Il n'y eut aucun problème lors de ces vols et le planeur put atterrir à chaque fois sans casse. La construction du premier prototype motorisé fut achevée en mai 1949 sous la désignation 346D (ou encore 346-II ou 346-2). L’appareil fut cependant équipé au début d’un moteur inerte. Le 346-2 présentait quelques différence avec le 346P comme l’absence de volets d’atterrissage. L’empennage avait été largement modifié avec une flèche plus grande (45° au lieu de 35 ) et un profil plus mince pour la profondeur. L’épaisseur relative du gouvernail était également réduite (9 % au lieu de 12 %). Le 30 septembre 1949, le 346-2 est largué à 9700 mètres du B-29 et réalise un premier vol propulsé avec Ziese aux commandes. Après quelques difficultés pour contrôler l’appareil, Ziese fut contraint d’atterrir à une vitesse trop élevée (environ 310 km/h ) sans doute en raison de l’absence des volets d’atterrissage. Après un rebond, et la rupture du patin, l’appareil se posa sur le ventre ce qui provoqua des dommages à l’appareil et des blessures au pilote. Après réparation de l’appareil, les essais en vol reprirent avec le pilote russe P I Kasmin sur le terrain de Lukhovitsy en octobre 1950. Entre-temps, Ziese avait récupéré, et le 10 mai 1951, il vola sans incident sur le « 346-2 », puis le 16 juin sur le « 346-3 » pour son premier vol plané. Le 13 août 1951, il faisait voler le 346-3, en utilisant le moteur-fusée pour la première fois mais avec la chambre de croisière seule. Des essais en soufflerie avaient montré que les gouvernes de vol deviendraient inefficaces aux vitesses transsoniques et les 346 furent limités à Mach 0,9. Ziese réalisa un autre vol le 2 septembre, mais lors du troisième vol, le 14 septembre, il perdit le contrôle de l’appareil. Après avoir enchaîné tonneau, piqué, puis auto-rotation, Ziese se résigna à déclencher la séparation du cockpit grâce aux boulons explosifs. Le dispositif de stabilisation puis d’éjection de l’habitacle fonctionna parfaitement et Ziese se posa sain et sauf sous son parachute. Après l’accident du 346-3, le programme fut abandonné et les ingénieurs allemands rapatriés en Allemagne de l’Est en 1953. De toute façon, les Américains avaient vaincu le mur du son avec le Bell X-1 depuis déjà quatre ans et les Russes préféraient se concentrer sur le développement de turboréacteur de forte puissance et sur la construction de moyens d’essais permettant de se passer des avions expérimentaux comme le 346.
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Sources : 1) Soviet X-Plane de Y. Gordon et B. Gunston |
Les avions-fusée russes |