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XI. Les vols records
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Translate : in English in Spanish in German 11-2 Objectif : 80 000 mètres d'altitude !

 

 

Restait à entreprendre l'assaut final, celui qui devait mener le X-15 à 76 200 m (250 000 ft), valeur contractuelle, ou plutôt 80 000 m, objectif qui n'était pas fixé au hasard—Les 80 km correspondaient en effet aux fameux "50 miles" où l’US Air Force situait la frontière entre l'atmosphère et l'espace, entre l'Aviation et l'Astronautique. Si White franchissait cette limite, il deviendrait le premier astronaute en uniforme bleu, à placer à égalité avec Shepard et Grissom, les deux seuls Américains de l'espace en cette fin d'année 1961, L'USAF, qui avait perdu l'essentiel de ses prérogatives en matière d'espace habité, au profit de la NASA, verrait là un juste retour des choses.

Le premier astronaute "ailé".

L'outil de cet accomplissement venait d'arriver à Edwards, le 29 octobre 1961. Il s'agissait du X-15 n° 3 (matricule 56-6672), entièrement reconstruit après son explosion au sol le 8 juin 1960, lors d'un essai statique du premier moteur XLR-99. Le n° 56-6672 se distinguait des deux autres X-15 par un système de commandes de vol révolutionnaire, désigné MH-96 et fabriqué par Honeywell à Minneapolis. Il associait les commandes aérodynamiques et le système de stabilisation par fusées en un seul dispositif commandé par le pilote au travers du mini-manche "high g". Suivant l'environnement du véhicule (atmosphérique, spatial ou hybride), le MH-96 réagissait automatiquement pour activer gouvernes ou/et fusées. Cet équipement permettrait d'aborder avec davantage de confiance et de sécurité la tentative prochaine de record d'altitude.

Neil Armstrong

Neil A. Armstrong fut désigné pour réaliser les essais du troisième X-15. Ensuite, White prendrait le relais pour décrocher le titre d'astronaute ! Le 20 décembre 1961, Armstrong effectua ce qui était aussi son premier vol (mission 3-1-2) sur un véhicule équipé du XLR-99 et réalisa, avec un plein succès, le premier test du MH-96 jusqu'à l'altitude, modeste, de 24 700 m. Trois autres vols suivirent, entre le 17 janvier et le 20 avril 1962, au cours desquels il évalua le MH-96 de plus en plus haut, jusqu'à 63 250 m, et à très faible pression dynamique. Cette démonstration devait valoir au pilote l'Octave Chanute Award de 1962.

Le 30 avril 1962, Joe Walker marqua un point très important (mission 1-27-48) dans la course aux 80 kilomètres, en portant le nouveau record d'altitude à 75 190 m à bord du X-15 n° 1, frôlant ainsi la performance inscrite au cahier des charges (76 200 m ou 250 000 pieds). Ce vol servit en outre à évaluer le comportement des fusées de stabilisation à haute altitude. Il permit par ailleurs d'approcher la limite d'incidence avec dérive ventrale complète, lors de la rentrée atmosphérique (+21").... La température maximale atteinte pendant le vol n'atteignit "que" 480°C ; cela illustrait le fait que plus l'angle d'attaque du X-15 était grand, moins l'échauffement à la rentrée était critique.

 

 

Un peu moins de deux mois plus tard, le 21 juin (mission 3-6-10), il était prévu que Bob White atteindrait les 250 000 ft symboliques. "250.000 ft ou privé de dessert ! " pouvait-on lire sur le fuselage du X-15 n° 3 avant le vol. Mais White se contenta d'atteindre exactement les 75190 m de son collègue de la NASA...

Six jours plus tard (mission 1-30-51), Walker engagea le X-15 n° 1 dans une rentrée atmosphérique à +23° d'incidence, valeur limite avec la dérive ventrale complète. Cette valeur devait être atteinte lors du vol record d'altitude en préparation. Le vol du X-15 vers l'espace, au-delà de 80 km d'altitude, pouvait maintenant être envisagé. La tentative de record commença par trois abandons, les 10, 11 et 16 juillet 1962, qui mirent à l'épreuve les responsables et les observateurs.

Parmi ces derniers, on notait la présence des représentants de la National Aeronautic Association (branche américaine de la FAI) chargés d'homologuer le record, Le 17 juillet 1962 (mission 3-7-14), l'avion porteur NB-52 piloté par le Major John E. Allavie, largua le X-15 n° 3 à la verticale de Smith Ranch Lake et à plus de 500 km du point d'atterrissage prévu. Aussitôt largué, White mit la pleine puissance et grimpa à 41° à l'assaut de son record. Après 84 s, le XLR-99 s'arrêta, laissant le X-15 à Mach 5,45 et 48158 m d'altitude. Avec le MH-96, White poursuivît sa trajectoire balistique, fonçant dans une atmosphère de plus en plus rare et un ciel de plus en plus sombre. Il atteignit 95 935,99 m (valeur homologuée) au sommet de la parabole.

Le X-15 fonce vers l'espace !

 

 

Ca y était ! le X-15 baignait dans l'espace "officiel", et, avec lui, le Major White, premier pilote-astronaute de l'Histoire. De là-haut, le pilote apercevait toute la côte occidentale des Etats-Unis, depuis la baie de San Francisco jusqu'au Mexique, de même que la courbure de la Terre. Mais ses observations qui avaient transporté d'enthousiasme les journalistes en 1960, lors de son premier vol en altitude, n'avaient plus !e même attrait en juillet 1962, à l'apogée du programme spatial Mercury.

Malgré une pression dynamique presque nulle, le pilote mit le X-15, grâce aux fusées de stabilisation, en position pour revenir dans l'atmosphère à 23,6° d'incidence. Après un peu plus de trois minutes d'impesanteur, White recommença à ressentir l'effet des accélérations, qui atteignirent près de 5 g au cours d'une descente également marquée par de fortes vibrations en lacet.

A 5 500 m d'altitude, White ouvrit les aérofreins et rétablît son véhicule. Cette fois, aucun effet thermique ne vint marquer la fin de la rentrée atmosphérique : la modification apportée au pare-brise du cockpit était efficace. Au terme d'une descente en spirale destinée à ralentir, White présenta le X-15 se posa triomphalement sur le Rogers dry Lake. Après son vol à Mach 6, White avait été félicité par Chuck Yeager. Cette fois, en sortant du cockpit, le pilote astronaute reçut une poignée de mains au moins aussi importante, celle de son fils Gregory, alors âge de huit ans.

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