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IX. Les vols constructeurs
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Translate : in English in Spanish in German 9-5 Le premier vol propulsé

 

 

La voie qui menait au premier vol propulsé était désormais ouverte, ce qui ne signifie pas qu'elle était dépourvue d'obstacles. Des obstacles en général de faible importance, mais dont l'accumulation devait produire un sérieux retard. Les composants des différents circuits cryogéniques étaient à l'origine des plus grosses difficultés. Par exemple, l'hélium stocké dans l'avion à -150 °C et 240 bars.

Les régulateurs de pression, légers et d'encombrement réduit, devaient supporter des débits pouvant atteindre 30 m3/s et pouvoir ramener la pression de 240 à 3 bars. En outre, il fallait que ces composants fournissent une réponse rapide à de faibles variations de pression sinon des surpressions momentanées ne pourraient être distingués d'une véritable sur-pressurisation du système par les vannes elles-mêmes.

L'environnement et les performances de ces composants (régulateurs, valves, joints...) étaient d'une sévérité sans précédent et expliquent les difficultés de mise au point. De semaine en semaine, la date prévue pour la mission "2-1-2" fut repoussés et l'on arriva ainsi à la fin du mois d'août. Le 28, une première tentative déboucha sur un ajournement, à la grande déception des journalistes, le débonnaire Col Brown déclara que le prochain essai interviendrait le premier septembre. En fait, c'est le 4 septembre, à 07h06, que le NB-52 décolla avec, sous son aile, le X-15 n° 2 à pleine charge.

La mission se déroulait correctement quand, à quatre minutes du lancement, Crossfield constata que la pression d'hélium avait chuté à 0.4 bar. Immédiatement, Scott avertit le sol, arrêta la chronologie du largage et entama la vidange des réservoirs. La mission " 2-1-2" était devenue " 2-A-2 " (le "A" signifiant Avorté), à cause d'un régulateur défaillant.

 

 

La mission "2-1-3 " démarra aussitôt. Ces reports successifs n'étaient pas anormaux compte-tenu de la complexité et de la nouveauté du X-15. Mais la présence des journalistes obnubilés par la "course à l'espace " et le désir de voir le X-15 devenir, le plus vite possible, le premier vaisseau spatial, donnait au moindre contretemps une allure d'échec et alourdissait encore une atmosphère peu compatible avec la sérénité requise pour des essais en vol.

L'excitation monta d'un cran à partir du 15 septembre Nikita Khroutchev, chef de l'Etat soviétique, commençait sa visite officielle aux Etats-Unis, et dès son arrivée, avait évoqué le succès récent de Luna-2 : la première sonde envoyée sur le sol lunaire, et laissa entendre que l'URSS s'apprêtait à réaliser des premières spatiales encore plus ambitieuses et plus spectaculaires. Et chacun de redouter alors l'envoi d'un Russe dans l'espace pendant le séjour américain de Monsieur "K". C'est donc dans une ambiance très particulière, faite de confusion, d'impatience et d'exaspération que se préparait, depuis maintenant plus d'un mois, le premier vol X-15, à pleine poussée de ses moteurs-fusée. Enfin le 17 septembre arriva.

-Ready to go !" lança Crossfield à 8h06, alors que le NB-52, croisant à 11 600 m d'altitude et environ 700 km/h, arrivait au-dessus de son point de largage, à la verticale de Rosamond. Scott mit à feu les deux premières chambres de combustion des moteurs XLR-11 tandis que Chuck Bock, à bord de la " Stratofortress ", annonçait la fin du compte à rebours de la séparation.

 

 

Le X-15 se détacha de son pylône et tomba comme une pierre. Quelques secondes plus tard, Crossfield avait allumé, l'une après l'autre, les six autres tuyères. Après une chute d'environ 1500 m, le X-15 monta à 7° d'incidence pour atteindre l'altitude prévue à 15240 m. En quelques instants, le X-15 laissa loin derrière et en dessous son avion-porteur et les avions d'accompagnement, marquant sa trajectoire par un panache épais de fumée blanche.

Il passa Mach 1 à 10670 m et atteignit Mach 1,2 à 15950 m. Ce dépassement de 710 m de l'altitude prévue était dû à la poussée des moteurs, un peu plus forte que prévu. Maintenant le palier, Scott accéléra jusqu'à Mach 1,6, après quoi il effectua un virage à 2,4 g (plus de 60° d'inclinaison) juste avant d'accélérer enfin jusqu'à Mach 2,11 (contre Mach 2 prévu). Coupant ensuite trois chambres de combustion sur les huit, Il procéda à des essais de stabilité sur les trois axes, puis repartit en virage à 2,4 g jusqu'à extinction complète des moteurs.

Alors, il mit le cap sur le Rogers dry Lake. Pendant la descente, d'autres impulsions en tangage, roulis et lacet permirent d'évaluer la stabilité du véhicule non propulsé. Panneau inférieur de dérive largué, Crossfîeld fît son approche finale en utilisant cette fois le manche central. Le X-15 se montra d' une stabilité parfaite, confirmée par Bob White qui le serrait de très près avec un F-104. A 90 m au-dessus de la piste, Crossfield sortit le train d'atterrissage et, quelques secondes plus tard, le X-15 n° 2 toucha le sol à 340 km/h pour terminer cette brillante mission par une course sur le lac asséché d'Edwards en faisant jaillir une haute gerbe de poussière grise.

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